Les sept moyens de monter dans la Lune - Cyrano de Bergerac (Edmond Rostand)
Edmond Rostand (qui, par ailleurs, a commis le Petit Chat) a empli sa pièce Cyrano de Bergerac - entièrement versifiée - de morceaux de bravoure poétique, la célèbre tirade des nez bien sur, mais aussi cette superbe envolée (magnétique vers la fin) vers la Lune que la carte du comptoir des poésies vous propose pour une de ses premières livraisons de 2009.
Je pouvais, mettant mon corps nu comme un cierge,
Le caparaçonner de fioles de cristal
Toutes pleines des pleurs d'un ciel matutinal,
Et ma personne, alors, au soleil exposée,
L'astre l'aurait humée en humant la rosée !
Et je pouvais encor
Faire engouffrer du vent, pour prendre mon essor,
En raréfiant l'air dans un coffre de cèdre
Par des miroirs ardents mis en icosaèdre !
Ou bien, machiniste autant qu'artificier,
Sur une sauterelle aux détentes d'acier,
Me faire, par des feux successifs de salpêtre,
Lancer dans les prés bleus où les astres vont paître !
Puisque la fumée a tendance à monter,
En souffler dans un globe assez pour m'emporter !
Puisque Phoebé, quand son arc est le moindre
Aime sucer, ô boeufs, votre moëlle ... m'en oindre !
Enfin, me plaçant sur un plateau de fer,
Prendre un morceau d'aimant et le lancer en l'air !
Ca, c'est un bon moyen : le fer se précipite,
Aussitôt que l'aimant s' envole, à sa poursuite,
On relance l'aimant bien vite, et cadédis !
On peut ainsi monter indéfiniment.
[...]
A l'heure où l'onde par la Lune est attirée,
Je me mis sur le sable après un bain de mer
Et la tête partant la première, mon cher,
Car les cheveux, surtout, gardent l'eau dans leur frange !
Je m'enlevai dans l'air, droit, tout droit, comme un ange.
Je montais, je montais doucement, sans efforts,
Quand je sentis un choc ! ... Alors ...
Alors ?
Alors ...
Je pouvais, mettant mon corps nu comme un cierge,
Le caparaçonner de fioles de cristal
Toutes pleines des pleurs d'un ciel matutinal,
Et ma personne, alors, au soleil exposée,
L'astre l'aurait humée en humant la rosée !
Et je pouvais encor
Faire engouffrer du vent, pour prendre mon essor,
En raréfiant l'air dans un coffre de cèdre
Par des miroirs ardents mis en icosaèdre !
Ou bien, machiniste autant qu'artificier,
Sur une sauterelle aux détentes d'acier,
Me faire, par des feux successifs de salpêtre,
Lancer dans les prés bleus où les astres vont paître !
Puisque la fumée a tendance à monter,
En souffler dans un globe assez pour m'emporter !
Puisque Phoebé, quand son arc est le moindre
Aime sucer, ô boeufs, votre moëlle ... m'en oindre !
Enfin, me plaçant sur un plateau de fer,
Prendre un morceau d'aimant et le lancer en l'air !
Ca, c'est un bon moyen : le fer se précipite,
Aussitôt que l'aimant s' envole, à sa poursuite,
On relance l'aimant bien vite, et cadédis !
On peut ainsi monter indéfiniment.
[...]
A l'heure où l'onde par la Lune est attirée,
Je me mis sur le sable après un bain de mer
Et la tête partant la première, mon cher,
Car les cheveux, surtout, gardent l'eau dans leur frange !
Je m'enlevai dans l'air, droit, tout droit, comme un ange.
Je montais, je montais doucement, sans efforts,
Quand je sentis un choc ! ... Alors ...
Alors ?
Alors ...