Puisque je vois que mes afflictions (Pontus de Tyard)
Encore un poète surtout connu de sa famille...
Puisque je vois que mes afflictions
Sont au plus haut degré de leur effort,
Et que le Ciel conjuré à ma mort
A tout malheur me guide,
Regrets, soupirs, plaints, pleurs, et passions,
Je vous lâche la bride.
Je n'ai espoir que mon cri entendu
Puisse adoucir la fière cruauté
De ma déesse, et dame de beauté,
Mais ce mal me console,
Que c'est bien peu, m'étant déjà perdu,
De perdre ma parole.
Je sens couler et les jours, et les nuits,
Mais non l'effort de l'ardeur s'apaiser
De mes soupirs, ou la mer s'épuiser
Des larmes que je pleure,
Car le penser, sujet de mes ennuis,
Toujours en moi demeure.
Le trait par vous, ô mes yeux, fut reçu,
Qui me blessa au coeur si rudement,
Quand, attiré d'un vain contentement,
Lui fites ouverture.
Las, si par vous, mal cauts, je fus déçu,
Vous en payez l'usure.
Espoir trompeur, inutile secours,
Que je voulus à mes travaux choisir,
Songe illusif, ombre de mon désir,
Ta promesse faillie
Ne m'a laissé du fruit de mes discours
Que la mélancolie.
Je ne tiens point pour comble de malheur,
Car je me suis au deuil tant dédié,
Que j'aie mon bien, et moi-même oublié,
Que triste il me faut vivre,
Mais je me plains, que l'amère douleur
A la mort ne me livre.
Mourir ne puis, hélas, et ne vis point,
Si fais, je vis, misérable, d'autant
Que la douleur, qui me va combattant,
Aux plaints, aux pleurs me mène,
Et n'ai de vie au plaisir un seul point,
Vivant tout à la peine.
Quand je naquis, l'astre de mon destin
Tout incliné à cruelle impitié,
M'éloigna tant des aspects d'amitié,
Que je me hais moi-même.
Ah, je connais, mais trop tard, quelle fin
Prend qui vainement aime.
Laisse-moi seul en ce lieu tourmenter,
Chanson, non, mais complainte,
Car tu ne fais que le deuil augmenter,
Dont mon âme est atteinte.
Puisque je vois que mes afflictions
Sont au plus haut degré de leur effort,
Et que le Ciel conjuré à ma mort
A tout malheur me guide,
Regrets, soupirs, plaints, pleurs, et passions,
Je vous lâche la bride.
Je n'ai espoir que mon cri entendu
Puisse adoucir la fière cruauté
De ma déesse, et dame de beauté,
Mais ce mal me console,
Que c'est bien peu, m'étant déjà perdu,
De perdre ma parole.
Je sens couler et les jours, et les nuits,
Mais non l'effort de l'ardeur s'apaiser
De mes soupirs, ou la mer s'épuiser
Des larmes que je pleure,
Car le penser, sujet de mes ennuis,
Toujours en moi demeure.
Le trait par vous, ô mes yeux, fut reçu,
Qui me blessa au coeur si rudement,
Quand, attiré d'un vain contentement,
Lui fites ouverture.
Las, si par vous, mal cauts, je fus déçu,
Vous en payez l'usure.
Espoir trompeur, inutile secours,
Que je voulus à mes travaux choisir,
Songe illusif, ombre de mon désir,
Ta promesse faillie
Ne m'a laissé du fruit de mes discours
Que la mélancolie.
Je ne tiens point pour comble de malheur,
Car je me suis au deuil tant dédié,
Que j'aie mon bien, et moi-même oublié,
Que triste il me faut vivre,
Mais je me plains, que l'amère douleur
A la mort ne me livre.
Mourir ne puis, hélas, et ne vis point,
Si fais, je vis, misérable, d'autant
Que la douleur, qui me va combattant,
Aux plaints, aux pleurs me mène,
Et n'ai de vie au plaisir un seul point,
Vivant tout à la peine.
Quand je naquis, l'astre de mon destin
Tout incliné à cruelle impitié,
M'éloigna tant des aspects d'amitié,
Que je me hais moi-même.
Ah, je connais, mais trop tard, quelle fin
Prend qui vainement aime.
Laisse-moi seul en ce lieu tourmenter,
Chanson, non, mais complainte,
Car tu ne fais que le deuil augmenter,
Dont mon âme est atteinte.