vendredi 11 janvier 2008

Connaissez vous mon Andalouse ? (Jules Verne)

Après la série sur Evangeline, voici, sur le comptoir des vers, une brève série de poèmes à la carte avec le mot "mot".
Car, comme proclame un chanteur inénarrable et néammoins
national, "les mots, les mots ne sont jamais les mêmes".


Connaissez-vous mon Andalouse,

Plus belle que les plus beaux jours,

Folle amante, plus folle épouse,

Dans ses amours, toute jalouse,

Toute lascive en ses amours !

Vrai dieu ! De ce que j'ai dans l'âme,

Eussé je l'enfer sous mes pas,

Car un mot d'amour de ma dame

A seul allumé cette flamme,

Mon âme ne se plaindra pas !

C'est que ma belle amante est belle,

Lorsqu'elle se mire en mes yeux !

L'étoile ne luit pas tant qu'elle,

Et quand sa douce voix m'appelle,

Je crois qu'on m'appelle des Cieux !

C'est que sa taille souple et fine

Ondule en tendre mouvement,

Et parfois de si fière mine,

Que sa tête qui me fascine

Eblouit comme un diamant !

C'est que la belle créature

Déroule les flots ondoyants

D'une si noire chevelure

Qu'on la couvre, je vous jure,

De baisers tout impatients !

C'est que son oeil sous sa paupière

Lance un rayon voluptueux,

Qui fait bouillir en mon artère,

Tout ce que Vénus de Cythère

Dans son sein attise de feux !

C'est que sur ses lèvres de rose

Le sourire de nuit, de jour

Brille comme une fleur éclose

Et quand sur mon coeur il se pose,

Il le fait palpiter d'amour !

C'est que lorsqu'elle m'abandonne

Sa blanche main pour la baiser,

Que le ciel se déchaîne et tonne,

Que m'importe, - Dieu me pardonne,

Il ne peut autant m'embraser !

C'est que sa bouche bien-aimée

Laisse tomber comme une fleur

Douce haleine parfumée,

Et que son haleine embaumée

Rendrait aux roses leur couleur !

C'est que sa profonde pensée

Vient se peindre en son beau regard,

Et que son âme est caressée,

Comme la douce fiancée

Quand l'amant vient le soir bien tard !

Allons l'amour, les chants, l'ivresse !

Il faut jouir de la beauté !

Amie ! oh que je te caresse !

Que je te rende, ô ma maîtresse,

Palpitante de volupté !

Oh ! viens ! viens toute frémissante,

Qu'importe qu'il faille mourir,

Si je te vois toute expirante

Sous mes baisers, ma belle amante,

Si nous mourons dans le plaisir !