Fantaisie (Gérard de Nerval)
La carte du comptoir des vers continue sa série sur la matière première du poème le pied avec une fantaisie de Gérard de Nerval.
Pourtant la fantaisie n'était pas la spécialité de cet poète tourmenté et neurasthénique qui ponctua son oeuvre en se pendant à une porte cochère.
Cette livraison délaisse Arthur Rimbaud et ses Voyelles, Sensations, Bohème, Chanson de la plus haute tour, Dormeur du Val, Bateau Ivre, Vénus Anadyomène, Petites amoureuses et Orgie parisienne.
Et toujours pas de Guillaume Apollinaire (le Pont Mirabeau, Nuit Rhénane, l'Adieu ...) en vue ...
Il est un air pour qui je donnerais
Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,
Un air très vieux, languissant et funèbre,
Qui pour moi seul a des charmes secrets.
Or, chaque fois que je viens à l'entendre,
De deux cents ans mon âme rajeunit :
C'est sous Louis treize et je crois voir s'étendre
Un coteau vert, que le couchant jaunit,
Puis un château de brique à coins de pierre,
Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
Ceint de grands parcs, avec une rivière
Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs,
Puis une dame, à sa haute fenêtre,
Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
Que dans une autre existence peut-être,
J'ai déjà vue... et dont je me souviens !