jeudi 6 novembre 2008

Simultanéités (Guillaume Apollinaire)

A l'approche du quatre vingt dixième anniversaire du décès du poète le 9 novembre 1918, la longue série sur Guillaume Apollinaire (le Pont Mirabeau, Nuit Rhénane, l'Adieu, l'Emigrant de Landor Road, Ô naturel désir, Nocturne, A l'Italie, Acousmate, Marizibill, La Victoire, Le Chef de Section, Chant de l'Horizon en Champagne, Le Vigneron Champenois, Dans l'Abri-caverne, Fusée, 14 juin 1915 ...) continue d'enrichir la carte du comptoir des vers avec encore un poème datant la première guerre mondiale.

Guillaume Apollinaire s'est engagé volontairement en 1914 dans l'armée française et a combattu durant la première guerre mondiale comme "poilu" dans l'artillerie, particulièrement en 1915 sur le front de Champagne.
Cet engagement lui permit d'être naturalisé
français en 1917 (il avait avant cela la nationalité polonaise de sa mère).
En 1916, le poète fut atteint à la tête par un éclat d'obus. Cette blessure, qui lui valut une trépanation, affecta durablement
Apollinaire qui mourut de la grippe espagnole juste avant l'armistice du 11 novembre 1918.
Bien que célèbre pour ses poèmes d'amour (notamment "
Pont Mirabeau"), Guillaume Apollinaire est avant tout le poète tragique de la Grande Guerre et de ses horreurs.


Pour cause d'Apollinaire et de guerre de 1914-1918, la carte du comptoir des vers ne propose plus d'
Arthur Rimbaud (Voyelles, Sensations, Ma Bohème, Chanson de la plus haute tour, le Dormeur du Val, le Bateau Ivre, Vénus Anadyomène, Petites amoureuses ou l'Orgie parisienne).


Les canons tonnent dans la nuit

On dirait des vagues tempête

Des cœurs où pointe un grand ennui

Ennui qui toujours se répète

Il regarde venir là-bas

Les prisonniers L'heure est si douce

Dans ce grand bruit ouaté très bas

Très bas qui grandit sans secousse

Il tient son casque dans ses mains

Pour saluer la souvenance

Des lys des roses des jasmins

Éclos dans les jardins de France

Et sous la cagoule masqué

Il pense à des cheveux si sombres

Mais qui donc l'attend sur le quai

Ô vaste mer aux mauves ombres

Belles noix du vivant noyer

La grand folie en vain vous gaule

Brunette écoute gazouiller

La mésange sur ton épaule

Notre amour est une lueur

Qu'un projecteur du cœur dirige

Vers l'ardeur égale du cœur

Qui sur le haut Phare s'érige

Ô phare-fleur mes souvenirs

Les cheveux noirs de Madeleine

Les atroces lueurs des tirs

Ajoutent leur clarté soudaine

À tes beaux yeux ô Madeleine