dimanche 23 novembre 2008

Les mains d'Elsa (Louis Aragon)

Le comptoir des vers et sa carte poursuivent leur série Louis Aragon (Est-ce ainsi que les hommes vivent ?, Que serais-je sans toi ?, J'arrive où je suis étranger, L'affiche rouge, Nous dormirons ensemble) avec un des multiples opus sur Elsa.

Pour cause de Loulou Aragon, la carte du comptoir des vers stoppe l'Edmond Rostand (La tirade des nez de Cyrano de Bergerac, Le Petit Chat), l'Arthur Rimbaud (Voyelles, Sensations, Ma Bohème, Chanson de la plus haute tour, le Dormeur du Val, le Bateau Ivre, Vénus Anadyomène, Petites amoureuses ou l'Orgie parisienne) ou encore le Guillaume Apollinaire (le Pont Mirabeau, Nuit Rhénane, l'Adieu, l'Emigrant de Landor Road, Ô naturel désir, Nocturne, A l'Italie, Acousmate, Marizibill, La Victoire, Le Chef de Section, Chant de l'Horizon en Champagne, Le Vigneron Champenois, Dans l'Abri-caverne, Annie, A la Santé ...) .


Donne-moi tes
mains pour l'inquiétude

Donne-moi tes
mains dont j'ai tant rêvé

Dont j'ai tant
rêvé dans ma solitude

Donne-moi te
mains que je sois sauvé

Lorsque je les prends à mon pauvre piège

De paume et de peur de hâte et d'émoi

Lorsque je les prends comme une
eau de neige

Qui fond de partout dans mes
mains à moi

Sauras-tu jamais ce qui me traverse

Ce qui me bouleverse et qui m'envahit

Sauras-tu jamais ce qui me transperce

Ce que j'ai trahi quand j'ai tresailli

Ce que dit ainsi le profond langage

Ce parler muet de sens animaux

Sans bouche et sans yeux miroir sans image

Ce frémir d'aimer qui n'a pas de
mots

Sauras-tu jamais ce que les doigts pensent

D'une proie entre eux un instant tenue

Sauras-tu jamais ce que leur
silence

Un éclair aura connu d'inconnu

Donne-moi tes mains que mon coeur s'y forme

S'y taise le
monde au moins un moment

Donne-moi tes
mains que mon âme y dorme

Que mon âme y dorme éternellement.