lundi 16 février 2009

Le chat (Charles Baudelaire)

Ce soir sur la carte du comptoir des vers, un poème félin de Charles Baudelaire à rapprocher du Petit Chat d'Edmond Rostand.

A défaut, la carte du comptoir des poésies, sans aucun autre commentaire, propose aussi son "meilleur de" (comprenez "best of") :

- Charles Baudelaire : l'albatros, les bijoux, je n'ai pas pour maîtresse une lionne illustre (prélude à Sarah), toute entière, le chat, confession, à une dame créole, "j'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans", quand le ciel bas et lours pèse comme un couvercle, les ténèbres, le soleil, à celle qui est trop gaie, correspondances, une mendiante rousse, une martyre, le chat

- Edmond Rostand : tirade des nez de Cyrano de Bergerac, petit chat, sept moyens de monter dans la Lune, rois mages, l'hymne au soleil, nénuphars

- Arthur Rimbaud : le bateau ivre, voyelles, le dormeur du val, sensations, chanson de la plus haute tour, Vénus Anadyomène, petites amoureuses, ma Bohème, l'orgie parisienne

- Guillaume Apollinaire : le Pont Mirabeau, nuit rhénane, Marizibill, l'émigrant de Landor Road, dans l'abri-caverne, acousmate, ô naturel désir, Annie, l'adieu, la Victoire, à l'Italie, le chef de section, nocturne, le vigneron champenois, chant de l'horizon en Champagne, à la Santé

- Louis Aragon : l'étrangère, que serais-je sans toi ?, est-ce ainsi que les hommes vivent ?, Elsa, chambres d'un moment, chambre garnie, l'affiche rouge, les mains d'Elsa, Santa Espina, la rose et le réséda, Elsa au miroir, Charlot mystique, nous dormirons ensemble, un jour un jour, la belle italienne, j'arrive où je suis étranger, les yeux d'Elsa

- José Maria de Heredia : les conquérants, le voeu, soir de bataille, le tepidarium, le vitrail, la belle viole, l'esclave, fleurs de feu, Tranquillus

- Joachim du Bellay : heureux qui comme Ulysse, au fleuve de Loire


Dans ma cervelle se promène

Ainsi qu'en son appartement,

Un beau chat, fort, doux et charmant.

Quand il miaule, on l'entend à peine,

Tant son timbre est tendre et discret ;

Mais que sa voix s'apaise ou gronde,

Elle est toujours riche et profonde.

C'est là son charme et son secret.

Cette voix, qui perle et qui filtre

Dans mon fond le plus ténébreux,

Me remplit comme un vers nombreux

Et me réjouit comme un philtre.

Elle endort les plus cruels maux

Et contient toutes les extases ;

Pour dire les plus longues phrases,

Elle n'a pas besoin de mots.

Non, il n'est pas d'archet qui morde

Sur mon coeur, parfait instrument,

Et fasse plus royalement

Chanter sa plus vibrante corde,

Que ta voix, chat mystérieux,

Chat séraphique, chat étrange,

En qui tout est, comme en un ange,

Aussi subtil qu'harmonieux !

De sa fourrure blonde et brune

Sort un parfum si doux, qu'un soir

J'en fus embaumé, pour l'avoir

Caressée une fois, rien qu'une.

C'est l'esprit familier du lieu ;

Il juge, il préside, il inspire

Toutes choses dans son empire ;

Peut-être est-il fée, est-il dieu ?

Quand mes yeux, vers ce chat que j'aime

Tirés comme par un aimant

Se retournent docilement

Et que je regarde en moi-même

Je vois avec étonnement

Le feu de ses prunelles pâles,

Clairs fanaux, vivantes opales,

Qui me contemplent fixement.