dimanche 22 février 2009

Les pauvres à l'église (Arthur Rimbaud)

Après une longue interruption, la carte du comptoir des vers repropose du Rimbaud avec ce terrible et violent poème de révolte intitulé pauvres à l'église fait pour être hurlé plutôt que sussurré.

La carte du comptoir des poésies, sans commentaire, vous suggère aussi d'essayer ses classiques :

- D'autres Arthur Rimbaud : le bateau ivre, le dormeur du val, voyelles, sensations, chanson de la plus haute tour, ma Bohème, Vénus Anadyomène, l'homme juste, petites amoureuses, première soirée, aube, au cabaret vert (cinq heures du soir), Bruxelles, l'orgie parisienne, Michel et Christine, les douaniers, Marine, les mains de Jeanne-Marie, les assis, soleil et chair, tête de faune, à la musique, chant de guerre parisien, mouvement, jeune ménage, age d'or, ô saisons ô chateaux, les étrennes des orphelins

- Guillaume Apollinaire : le Pont Mirabeau, l'adieu, nuit rhénane, le chef de section, nocturne, ô naturel désir, Marizibill, la Victoire, l'émigrant de Landor Road, le vigneron champenois, chant de l'horizon en Champagne, acousmate, à l'Italie, Annie, dans l'abri-caverne, à la Santé

-
Joachim du Bellay : heureux qui comme Ulysse, cent fois plus qu'à louer on se plaît à médire, au fleuve de Loire, à Madame Marguerite d'écrire en sa langue

- Charles Baudelaire : l'albatros, les bijoux, toute entière, je n'ai pas pour maîtresse une lionne illustre (prélude à Sarah), une martyre, j'aime le souvenir de ces époques nues, une mendiante rousse, confession, les ténèbres, "j'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans", quand le ciel bas et lours pèse comme un couvercle, le soleil, à celle qui est trop gaie, correspondances, à une dame créole, le chat

- Edmond Rostand : tirade des nez de Cyrano de Bergerac, sept moyens de monter dans la Lune (Cyrano de Bergerac), petit chat, l'hymne au soleil, rois mages, nénuphars

- Louis Aragon : l'étrangère, que serais-je sans toi ?, est-ce ainsi que les hommes vivent ?, l'affiche rouge, chambre garnie, chambres d'un moment, nous dormirons ensemble, la rose et le réséda, un jour un jour, Charlot mystique, Elsa au miroir, Elsa, les mains d'Elsa, la belle italienne, j'arrive où je suis étranger, Santa Espina, les yeux d'Elsa

- José Maria de Heredia : les conquérants, le vitrail, soir de bataille, le voeu, le tepidarium, la belle viole, l'esclave, fleurs de feu, Tranquillus

- Et bien entendu, le très long et très kitsch poème acadien de H.W. Longfellow Evangéline


Parqués entre des bancs de chêne, aux coins d'église

Qu'attiédit puamment leur souffle, tous leurs yeux

Vers le choeur ruisselant d'orrie et la maîtrise

Aux vingt gueules gueulant les cantiques pieux,

Comme un parfum de pain humant l'odeur de cire,

Heureux, humiliés comme des chiens battus,

Les Pauvres au bon Dieu, le patron et le sire,

Tendent leurs oremus risibles et têtus.

Aux femmes, c'est bien bon de faire des bancs lisses,

Après les six jours noirs ou Dieu les fait souffrir !

Elles bercent, tordus dans d'étranges pelisses,

Des espèces d'enfants qui pleurent à mourir.

Leurs seins crasseux dehors, ces mangeuses de soupe,

Une prière aux yeux et ne priant jamais,

Regardent parader mauvaisement un groupe

De gamines avec leurs chapeaux déformés.

Dehors, le froid, la faim, l'homme en ribote :

C'est bon. Encore une heure ; après, les maux sans noms !

Cependant, alentour, geint, nasille, chuchote

Une collection de vieilles à fanons :

Ces effarés y sont et ces épileptiques

Dont on se détournait hier aux carrefours,

Et, fringalant du nez dans des missels antiques,

Ces aveugles qu'un chien introduit dans les cours.

Et tous, bavant la foi mendiante et stupide,

Récitent la complainte infinie à Jésus,

Qui rêve en haut, jauni par le vitrail livide,

Loin des maigres mauvais et des méchants pansus,

Loin des senteurs de viande et d'étoffes moisies,

Farce prostrée et sombre aux gestes repoussants ;

Et l'oraison fleurit d'expressions choisies,

Et les mysticités prennent des tons pressants,

Quand, des nefs où périt le soleil, plis de soie

Banals, sourires verts, les dames des quartiers

Distingués, Ô Jésus ! Les malades du foie

Font baiser leurs longs doigts jaunes aux bénitiers.