Ma maison (François Fabié)
"C'est là ma maison paternelle, c'est là le nid qui m'a bercé" ...
La carte du comptoir des vers est heureuse de publier une oeuvre immobilière et farinée de François Fabié, poète méconnu et néanmoins aveyronnais.
La carte du comptoir des poésies, sans aucun commentaire, analyse ou explication de texte, propose aussi de nombreux "classiques" présentés en bas de ce poème.
Face au midi, bien adossée
A l'ancien étang féodal
Dont elle épaule la chaussée,
Elle fut le moulin banal
Où deux ou trois pauvres villages
Et quelques petits mas perdus,
Avec leurs maigres attelages
Plusieurs siècles sont descendus
Moudre, au tic tac vieillot et grêle
D'un mécanisme trébuchant,
Tout ce que la dîme ou la grêle
Laissaient de seigle sur leur champ ...
Mais lorsque le soc populaire
Démantela le vieux château,
Et que, sous un flot de colère,
Son granit roula du coteau,
Mon aïeul, - un Jacques Bonhomme
Très longtemps meunier chez autrui,
Ayant été très économe,
Put devenir meunier chez lui.
Il acheta l'humble ruine,
Prit la truelle du maçon,
Et fit un moulin à farine
De l'antique moulin de son,
Exhaussa le tout d'un étage
Large, aéré, plein de soleil,
D'où l'on entend le caquetage
De la trémie à son réveil ;
Puis crânement, sur la toiture,
Comme un noble arbore un blason,
D'une meule en miniature
Il girouetta sa maison.
Il planta - car celui qui plante
A foi vraiment en l'avenir
Des arbres à croissance lente
Qui font durer le souvenir,
Et qui, maintenant séculaires,
Sur le vieux toit coubés du vent,
Parlent à voix hautes et claires
De l'ancêtre en eux survivant ...
Il prit femme ; et ma bonne aïeule
Se mit à l'oeuvre sans façons,
Berçant au refrain de sa meule
Trois filles et quatre garçons
Qui remplirent de cris, de joies,
De luttes et de jeux sans fin
La maison, le pâtis aux oies
Et tous les halliers du ravin,
Puis si vaillamment essaimèrent
Et si gaîment, quoique pieds nus,
Que des vieillards qui les aimèrent
Sont fiers de les avoir connus ...
C'est là ma maison paternelle,
C'est là le nid qui m'a bercé :
Que ne puis-je y ployer mon aile
Et n'y vivre que du passé ?
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Les "classiques" de la carte du comptoir des vers :
- Victor Hugo : ce siècle avait deux ans, l'an neuf de l'Hegire, demain dès l'aube, à une jeune fille
- Arthur Rimbaud : le bateau ivre, le dormeur du val, voyelles, sensations, ma Bohème, Vénus Anadyomène, Bruxelles, petites amoureuses, à la musique, aube, soleil et chair, chant de guerre parisien, première soirée, Michel et Christine, Marine, les assis, les douaniers,l'homme juste, les mains de Jeanne-Marie, les étrennes des orphelins, chanson de la plus haute tour, au cabaret vert (cinq heures du soir), jeune ménage,tête de faune, mouvement, age d'or, ô saisons ô chateaux, l'orgie parisienne, les pauvres à l'église
- Jean de la Fontaine : le savetier et le financier, le loup et l'agneau, le cheval s'étant voulu venger du cerf
- Guillaume Apollinaire : le Pont Mirabeau, l'adieu, nuit rhénane, acousmate, chant de l'horizon en Champagne, nocturne, ô naturel désir, dans l'abri-caverne, Annie, Marizibill, à l'Italie, le vigneron champenois, l'émigrant de Landor Road, la Victoire, le chef de section, à la Santé
- Charles Baudelaire : l'albatros, les bijoux, "j'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans", le soleil, une martyre, à une dame créole, toute entière, quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle, je n'ai pas pour maîtresse une lionne illustre (prélude à Sarah), correspondances, j'aime le souvenir de ces époques nues, une mendiante rousse, confession, à celle qui est trop gaie,les ténèbres, le chat
- Louis Aragon : l'étrangère, que serais-je sans toi ?, est-ce ainsi que les hommes vivent ?, Elsa au miroir, Elsa, Santa Espina,les mains d'Elsa, un jour un jour, nous dormirons ensemble, l'affiche rouge, la belle italienne, Charlot mystique, chambre garnie, chambres d'un moment, j'arrive où je suis étranger, la rose et le réséda, les yeux d'Elsa
- Edmond Rostand : tirade des nez de Cyrano de Bergerac, sept moyens de monter dans la Lune (Cyrano de Bergerac), petit chat, rois mages, l'hymne au soleil, nénuphars
- Sabine Sicaud : douleur je vous déteste, jour de fièvre, la solitude, premières feuilles, la vieille femme de la Lune, vous parler ?, chemins de l'ouest, la grotte des lépreux, la paix
- Joachim du Bellay : heureux qui comme Ulysse, au fleuve de Loire, cent fois plus qu'à louer on se plaît à médire, à Madame Marguerite d'écrire en sa langue
- José Maria de Heredia : les conquérants ("comme un vol de gerfauts hors du charnier natal"), l'esclave, le voeu, le tepidarium, la belle viole, le vitrail, soir de bataille, fleurs de feu, Tranquillus, le bain
- Et, aussi, l'indépassable poème acadien de H.W. Longfellow Evangéline